mercredi 30 janvier 2019

5 de cordée


En ces temps là, tout était simple.
Pour Marx, et quelques autres,il y avait la classe honnie des capitalistes, détenteurs des moyens de production, et les prolétaires qui n'avaient rien à vendre que leur force de travail.

Quelques classes intermédiaires aussi, comme les paysans,  du personnel d'encadrement, des commerçants, qui aux aux yeux de Marx avaient un côté parasite.
La réalité aujourd'hui est passablement plus complexe.
Les classes intermédiaires se sont considérablement étoffées, la classe paysanne s'est réduite à une portion congrue, et globalement les statuts sociaux peuvent être très différents au sein d'une classe définie par sa place dans le système de production.

Parabole de la cordée : au-delà du premier !

Puisque notre président semble adorer les images, nous allons prolonger son analogie du premier de cordée. Ce qui suit ne doit être pris que comme une esquisse d'analyse socio-économique.  Soit une cordée de cinq : 

les premiers de cordée sont les 1%, où l'on trouve les "100 familles" et aujourd'hui les patrons de l'industrie et du commerce, les Carlos Ghosn, les Henri Proglio, dont l'âpreté au gain est bien connue. 

On les voit rarement directement aux manettes politiques.

Maintenant séparons le reste des français en 4 parties équivalentes.

Les cinquièmes de cordée sont les ménages les plus pauvres, en dettes permanentes, suspendus aux aides sociales. 

On y trouve les 10% considérés comme pauvres selon les statistiques. Ils sont souvent dans les banlieues ghettoïsées des grandes villes. Globalement ils n'ont pas bénéficié des mesures d'urgence de Macron, du fait du mode de calcul de la prime d'activité ! Pour la toucher il faut déjà toucher un 1/2 smic. Et quant aux heures sup ... si on est à mi-temps, ça ne marche pas.

A l'autre bout, les seconds de cordée ont les yeux rivés sur les premiers de cordée :

cadres supérieurs aspirants directeurs, professions libérales cossues, professeurs d'université ou directeurs de recherche, hauts fonctionnaires de l'état, commerçants florissants. Ils ne comprennent guère les gilets jaunes : les fins de mois sont rarement difficiles pour eux. Ils sont le plus souvent urbains et les dépenses liées à la voiture ne sont pas leur souci. Ce sont chez eux que l'on trouve le cœur des 18% d'électeurs qui ont voté Macron au premier tour. Ce sont chez eux que se recrutent les serviteurs zélés, pour ne pas dire les laquais, qui portent la livrée néo-libérale qui sert les premiers de cordée.

Entre les deux, les troisièmes et quatrièmes de cordées.

Pour l'instant, arrêtons nous sur les quatrièmes de cordée : ils sont certes au-dessus du seuil de pauvreté mais les fins de mois sont acrobatiques. Un pépin et tout s'effondre. 

C'est vivre aujourd'hui dans la crainte permanente du lendemain qui déchante.
Les deux tiers ou les trois quarts des revenues partent en dépenses obligées non modulables : factures d'énergie et d'eau, loyers, remboursements d'emprunts, assurances ... et transports.
C'est le creuset des "jojos" gilets jaunes : des fonctionnaires au bas de l'échelle, des employés ou ouvriers du privé, de petits commerçants ou artisans, des petits retraités qui ont trimé toute leur vie pour une faible pension en peau de chagrin.

Les troisièmes de cordée ont un revenu médian : ils s'en sortent mieux mais pas au point de vivre tranquilles. 

S'ils perdent leur emploi, ils peuvent tomber dans la précarité, et ils le savent : des fonctionnaires, par exemple des enseignants, des agents de maîtrise ou des cadres du privé, des commerçants qui s'en sortent, des retraités plus aisés.

Globalement ils sont plutôt du côté des gilets jaunes, mais la violence des effraie.
Eux non plus n'ont guère été touchés par les mesures de Macron hormis la suppression de la taxe d'habitation. 

La cordée dans le débat

Le quatrième met son gilet jaune.
Le cinquième soupire ou approuve, mais ne moufte guère : d'abord il n'a pas de voiture et il a déjà la tête sous l'eau.
Le troisième regarde le quatrième, le comprend, l'approuve, et le soutient discrètement.
 
Parmi les deuxièmes, les plus obtus ou les plus cyniques des Macroniens restent figés dans leurs certitudes. Les autres hésitent, voire sympathisent, du moins au début du mouvement, avant que monte la violence bien mise en scène par les médias.
Globalement, ils sont moins sensibles que les 3 4 5ième de cordée au thème de la justice fiscale, entendue comme l'augmentation des impôts pour les hauts revenus. Et ce d'autant qu'un impôt plus progressif ou une augmentation des droits de succession pourraient les toucher. D'où d'ailleurs la cacophonie de l'exécutif sur les augmentation d'impôt. Maire rassure d'abord : les seconds de cordée, aussi, vont bénéficier de la suppression de la taxe d'habitation !  Mais d'autre parlent d'un retour déguisé à l'ISF, ou d'autres manière de taxer les plus riches. Niet dit alors Monsieur le Président. Sinon on perd nos soutiens (in petto).
Ceci dit, même chez eux, la suppression de l'ISF et la flat tax sur les revenus des capitaux mobiliers passent mal.
Pour la partie la plus à droite de cet électorat des deuxièmes de cordée, le gouvernement rajoute du zeste piqué à Sarko ou Fillon : nouvelle loi liberticide sur les manifestations, réouverture du dossier des quotas d'immigration ...




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